TA Nancy, juge des référés, 27 novembre 2024, n° 2403316
Le droit au silence fait timidement son entrée en matière de droit disciplinaire de la fonction publique.
Un mouvement de fond s’est emparé des juges administratifs depuis quelques mois, tendant à la reconnaissance de ce droit au bénéfice d’un fonctionnaire poursuivi disciplinairement.
C’est ainsi que les juges du fond se sont mis à prononcer l’annulation de sanctions prononcées à la suite d’une procédure disciplinaire au cours de laquelle le fonctionnaire ne s’était pas vu notifier son droit au silence (CAA Paris, 02 avril 2024, n°22PA03578 ; TA Dijon, 16 octobre 2024, n°403338).
Le Conseil constitutionnel, sais sur question préjudicielle de constitutionnalité, a fini par censurer l’article L. 532-4 du code général de la fonction publique, régissant les droits des fonctionnaires poursuivis devant le conseil de discipline, en tant qu’il ne prévoyait pas la notification de ce droit au silence (CC, 04 octobre 2024, QPC n°2024-1105).
Ce bouleversement des règles et de la pratique de la procédure disciplinaire de la fonction publique n’étonnera pas les familiers de la procédure pénale, pour lesquels le droit de se taire se déduit très naturellement de l’application de l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, fondement ancestral de la présomption d’innocence pour toute personne passible d’une sanction.
C’est donc de manière tout à fait tardive que le droit au silence finit par franchir les portes des juridictions administratives s’agissant du droit disciplinaire de la fonction publique.
Mais ce retard tend largement à être rattrapé par les juges administratifs, qui, en quelques mois, reconnaissent ce droit à l’envi, dans l’ensemble des aspects de la procédure disciplinaire des agents publics.
Sollicité par un agent public, le Cabinet a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nancy d’un référé suspension. La juridiction a suspendu la sanction de révocation à l’encontre de notre client prise à la suite d’une procédure disciplinaire. En effet, avant la procédure disciplinaire, l’agent public a été convoqué à un entretien, au cours duquel l’administration n’a pas été en mesure d’établir que le droit de se taire lui avait été notifié.
TA Nancy, Juge des référés, 27 novembre 2024, n° 2403316
La volonté d’aligner le droit au silence, tel qu’innervant la procédure pénale, en matière de discipline des fonctionnaires est claire, mais elle doit être encouragée, parce que nécessaires pour les droits de la défense, qui doivent être sanctuarisés dans tout domaine répressif.
Le droit de se taire fait et doit continuer de faire du bruit en matière disciplinaire.